Quand je me suis reconverti en tant que professeur des écoles, je me suis posé une question, une question essentielle à laquelle j’ai mis du temps à trouver ma réponse.
Cette question, c’est : « a quoi sert l’école? »
Lorsque j’ai trouvé ma réponse à cette question, ma détermination à réussir ma reconversion s’en est trouvée décuplée.
Ma réponse a cette question, c’est « Ouvrir le champ des possibles ».
En effet, pour moi, il est essentiel que l’école permette aux enfants de leur donner les outils pour qu’ils puissent se créer des opportunités, qu’ils rendent possible ce qui leur semblait impossible jusque là, leur donner l’inspiration et l’envie de réussir et le fait de croire qu’ils peuvent y arriver. Ainsi, après le plaisir d’apprendre et le goût de l’effort, ma troisième valeur est « la confiance en soi ».
Durant mes premiers jours devant mes élèves, quelque chose m’a beaucoup surpris. J’étais en classe de CM2 et dès le début de l’année, des élèves me disaient : « De toute façon, je suis nul en maths, je n’y arriverai jamais… ». J’ai été très surpris car je n’avais pas idée que ce sentiment d’être incapable de réussir soit déjà aussi ancrée et avec plus d’expériences je m’aperçois que je rencontre déjà ce sentiment dans une moindre mesure dès le CP!
Ce sont des perceptions d’eux-mêmes contre lesquels j’essaie de me battre au quotidien. Vous savez que je suis très attaché à l’état d’esprit de développement de Carol Dweck dont nous avons parlé dans l’épisode n°7 et j’ai à titre personnel, un exemple qui me fait me rappeler que tout est possible.
Quand j’étais collégien et lycéen, je me suis toujours considéré comme nul en allemand, je ne comprenais rien à cette langue qui semblait littéralement infernale. J’ai galéré de la 4ème à la terminale et c’est en tombant sur un professeur d’allemand extraordinaire en classes préparatoires que j’ai réussi à progresser et à prendre du plaisir à étudier cette langue. Et aujourd’hui, même si je n’ai plus le loisir de pratiquer cette langue au quotidien, je prends plus de plaisir à parler allemand qu’à parler anglais.
Alors, quand j’entends des élèves me dire qu’ils sont nuls en maths, qu’ils n’y arriveront jamais, j’essaie de tout faire pour changer leur perception d’eux-mêmes.
En effet, la perception que les élèves ont d’eux-mêmes est crucial pour leur réussite. Je cite un extrait du livre de François Taddéi : « Apprendre au XXIème siècle » qui raconte une expérience très frappante:
« Prétendant donner aux élèves un même exercice, on donne à la moitié d’une classe un exercice facile, à l’autre un exercice infaisable. La première moitié réussit, la seconde échoue. On reproduit le dispositif, avec la même répartition, une deuxième fois. Résultat identique. Puis on donne un troisième exercice qui est cette fois relativement facile et identique pour tout le monde. Eh bien, 80 % des élèves vont le réussir, 20 % vont le rater – ces derniers appartenant tous à la moitié de classe qui a échoué précédemment. Habituez-vous à réussir, vous aurez plus de chances de réussir. Habituez-vous à être en situation d’échec, vous risquez d’échouer « sans raisons » objectives. »
Et là, le rôle des enseignants est majeur, notamment le regard qu’ils portent sur leurs élèves. Je cite à nouveau.
« Si on affirme à un enseignant qu’il a quelques élèves géniaux, que ce soit vrai ou non, ces élèves auront plus progressé à la fin de l’année ! L’idée que se font les professeurs de leurs élèves produit un effet majeur sur les apprentissages incitant l’enseignant à avoir des attentes élevées à leur égard, eux-mêmes créant un climat affectif plus chaleureux, à donner plus d’informations sur les performances réalisées, à faire apprendre plus de contenus, et des contenus plus difficiles, et à donner plus d’opportunités de répondre et de poser des questions. »
Finalement, comme le disait Erik Prairat, pour qu’un enfant ait confiance en lui, il faut que quelqu’un ait confiance en lui avant, et c’est comme cela que je vois mon rôle de professeur. C’est pourquoi, je suis persuadé que mes élèves vont tous réussir sans exception quelque soit leurs difficultés et même si certains auront besoin de chemins différents pour y arriver. J’ai confiance en mes élèves et mon objectif est qu’il ait confiance en eux.
Tout au long de la semaine, vous avez pu découvrir mes 3 valeurs : le plaisir d’apprendre, le goût de l’effort, la confiance en soi…
Nous nous retrouvons la semaine prochaine pour faire la rencontre de Thomas Roulet, professeur en théorie des organisations à l’université de Cambridge.