Hier, avec Thibault d’INSPIREO, nous avons parlé de ces familles qui accueillent pendant plusieurs mois des enfants d’un autre pays pour les accompagner dans leur hospitalisation.
Ce qui m’a marqué, c’est l’humilité dont font preuve ces familles en se disant que ce qu’elles font, finalement, ce n’est pas grand chose. C’est ce qui m’a donné l’idée de commencer cette saison par le thème de l’humilité.
Pour cela, nous allons voyager loin… voyager loin dans l’espace puisque je vous donne RDV à 42 Unités Astronomiques de la Terre. Une unité astronomique correspond à la distance entre la Terre et le Soleil.C’est en effet à cette distance que la sonde spatiale Voyager 1 a pris, en 1990, une photo de la Terre. Ce n’était pas la mission première de cette sonde de prendre la Terre de si loin. Lancée en 1977, son objectif était d’étudier les planètes du système solaire. La sonde se trouve à ce jour aux limites du soleil solaire.
Mais en ce 14 février 1990, sous l’insistance de l’astronome Carl Sagan, Voyager 1 se retourne et prend des photos des planètes qu’elle a déjà visitées et sur un des clichés, on peut y voir la Terre. A cette distance, elle n’est qu’un point bleu pâle perdu au milieu de l’espace.

Voici ce que cette photo a inspiré à Carl Sagan :
“Regardez encore ce petit point. C’est ici. C’est notre foyer. C’est nous. Sur lui se trouvent tous ceux que vous aimez, tous ceux que vous connaissez, tous ceux dont vous avez entendu parler, tous les êtres humains qui aient jamais vécu. Toute la somme de nos joies et de nos souffrances, des milliers de religions aux convictions assurées, d’idéologies et de doctrines économiques, tous les chasseurs et cueilleurs, tous les héros et tous les lâches, tous les créateurs et destructeurs de civilisations, tous les rois et tous les paysans, tous les jeunes couples d’amoureux, tous les pères et mères, tous les enfants plein d’espoir, les inventeurs et les explorateurs, tous les professeurs de morale, tous les politiciens corrompus, toutes les “superstars”, tous les “guides suprêmes”, tous les saints et pécheurs de l’histoire de notre espèce ont vécu ici, sur ce grain de poussière suspendu dans un rayon de soleil.
La Terre est une toute petite scène dans une vaste arène cosmique. Songez aux fleuves de sang déversés par tous ces généraux et ces empereurs afin que nimbés de triomphe et de gloire, ils puissent devenir les maîtres temporaires d’une fraction d’un point. Songez aux cruautés sans fin imposées par les habitants d’un recoin de ce pixel sur d’indistincts habitants d’un autre recoin. Comme ils peinent à s’entendre, comme ils sont prompts à s’entretuer, comme leurs haines sont ferventes. Nos postures, notre propre importance imaginée, l’illusion que nous avons quelque position privilégiée dans l’univers, sont mis en question par ce point de lumière pâle. Notre planète est une infime tache solitaire enveloppée par la grande nuit cosmique. Dans notre obscurité — dans toute cette immensité — il n’y a aucun signe qu’une aide viendra d’ailleurs nous sauver de nous-mêmes. La Terre est jusqu’à présent le seul monde connu à abriter la vie. Il n’y a nulle part ailleurs, au moins dans un futur proche, vers où notre espèce pourrait migrer. Visiter, oui. S’installer, pas encore. Que vous le vouliez ou non, pour le moment c’est sur Terre que nous prenons position.
On a dit que l’astronomie incite à l’humilité et fortifie le caractère. Il n’y a peut-être pas de meilleure démonstration de la folie des idées humaines que cette lointaine image de notre monde minuscule. Pour moi, cela souligne notre responsabilité de cohabiter plus fraternellement les uns avec les autres, et de préserver et chérir le point bleu pâle, la seule maison que nous ayons jamais connue.”